Cinq gus dans un garage
Par cultive ton jardin le lundi 9 mars 2009, 14:07 - Cette France là - Lien permanent
Moi, j'y connais rien, à internet en général et à la loi Hadopi en particulier. J'utilise mon blog un peu comme un traitement de texte, toutes ses potentialités me demeurent hermétiques, vous avez vu, je sais même pas y placer une photo. Un peu comme si j'avais un téléphone portable dont je me servirais QUE pour téléphoner. Tu fais pitié, la vieille.
Mais j'ai vu virer au noir, le noir du deuil, à moins que ce ne soit celui de la colère, plusieurs blogs amis. Du coup, je me renseigne un peu. Et récemment, le truc des "cinq gus dans un garage" m'a bien fait marrer.
Ca commence par un site de combat, qui s'appelle "La quadrature du net". Vous connaissez le terme "La quadrature du cercle" pour signifier quelque chose d'impossible à résoudre. Moi aussi, mais pas vraiment, j'en ai appris plus ce matin. Des mathématiciens ont essayé vainement, pendant trois millénaires semble-t-il, de construire géométriquement à partir d'un cercle, un carré qui aurait la même surface que ce cercle. Hé bé... ça existe pas. Par nature, ça peut pas exister. Mais il a fallu trois millénaires pour s'y résigner, puis le démontrer. Cette impossibilité a un rapport avec le fait que le nombre connu sous le nom de "Pi" soit 3,1416 et des poussières, possède un nombre infini de décimales. Un nombre infini de poussières, sur lequel de très grands mathématiciens se sont cassé les dents. Comme je suis pas sûre d'avoir bien compris ni bien expliqué, je vous renvoie à leur texte. L'idée des mecs de "la quadrature du net", c'est que ceux qui essaient de domestiquer le net vont faire pareil. Mission impossible. "Ils rament à contre-courant de l'histoire".
Le 8 mars, une première dépêche de l'Agence France Presse, relate une de leurs actions en ces termes: "Un collectif de citoyens, La Quadrature du Net, encourage les internautes à abreuver les députés de mails hostiles à cette loi". Vous noterez l'emploi du verbe "abreuver" qui est tout sauf neutre. Au cas où vous n'auriez pas compris que ce sont des belus, l'AFP enfonce le clou: "Ce sont cinq gus dans un garage qui font des mails à la chaîne, relativise le cabinet de madame Albanel".
Sauf que ça, c'est à 8h13. Une dizaine d'heures plus tard, les cinq gus et leur garage ont disparu de la dépêche, remplacés par une formulation moins spontanée et beaucoup moins affriolante: "Le Ministère de la Culture a riposté dimanche en lançant une campagne d'information auprès des parlementaires qui recevront tous les jours une lettre électronique défendant le texte avec des témoignages d'artistes et de professionnels".
Trop tard, internet est un média ultra chaud et qui a une mémoire d'éléphant. Les cinq gus dans leur garage sont devenus célèbres et font déjà des vagues bien loin de leur sommaire abri. Un site est créé pour immortaliser l'expression. PCInpact nous refait toute la chronologie, preuves à l'appui. L'Agence France Presse essaie de donner pour son rectificatif sournois une explication tirée par les cheveux. La photo du garage où Hewlet Packard a fait ses débuts circule sur les blogs. Je rajouterais volontiers que l'aviation aussi a commencé dans un garage avec quelques cinglés qui faisaient rire les gens sérieux. Quant à savoir si Hewlet Packard et l'aviation sont un grand pas pour l'humanité, je n'entamerai pas ici le débat.
Cet incident rigolo m'inspire d'autres réflexions. Nous sommes gouvernés, et c'est pas nouveau mais ça prend des proportions grandioses, par le mépris, le mensonge et l'ignorance. La bêtise aussi?
Le mépris: Pas seulement dans le texte initial, mais aussi dans le correctif: "campagne d'information", suivi de "lettre électronique" ça fait vachement plus sérieux que "mails à la chaîne" quoique... est ce fondamentalement différent? "témoignages d'artistes et de professionnels" ouais, ça en jette. Combien de gus ça fait, au juste, tout ça? Une secrétaire dans un bureau Louis XV?
Le mensonge: Passons sur le correctif emberlificoté, un enfant de cinq ans qui ne veut pas reconnaître avoir dit une grosse bêtise est plus subtil. Il est très facile, s'agissant de mails envoyés par internet, de savoir si les messages viennent d'un seul ordinateur, voire de quatre ou cinq, ou s'ils sont envoyés par des milliers de personnes, d'autant que la plupart d'entre eux signent très certainement leurs courriers. Le ministère SAIT que les mails qui indisposent les députés UMP ne proviennent pas seulement de quelques internautes, mais d'une multitude.
L'ignorance: A moins que dans le cabinet de la ministre, ils ne sachent même pas ça? En tous cas, en matière de grandes inventions, ils devraient savoir que les débuts précaires font immédiatement surgir des personnages célèbres et mythiques: Archimède dans sa baignoire, Bernard Palissy brûlant ses meubles, Newton sous son pommier, Latécoère dans son garage, et autres images d'Epinal font partie intégrante, aujourd'hui, de la culture populaire. On ne peut pas déconsidérer un créatif en prétendant qu'il travaille avec des bouts de ficelle.
La bêtise: Ils semblent avoir fort bien compris quelle menace le net représente pour eux, c'est pas par hasard qu'ils essaient de le museler. Mais manifestement ils n'ont pas encore tiré toutes les conséquences de ce savoir. Laisser passer sur internet une phrase aussi attractive, puis tenter de la retirer... dix heures plus tard... pas fufu. Leur piège à campagnols super efficace... ils se sont pris les doigts dedans. Ouille, ça fait mal!
PS: à propos de bêtise, ne m'en veuillez pas si vous en trouvez dans ce texte, je suis pas ministre, moi, j'ai pas de "cabinet" super professionnel. Mon ordi est dans un couloir, j'ai même pas de garage.
Commentaires
Nan.
Sois tranquille, a vue de pif, il n'y a pas un gramme de bêtise dans ton fil.
Tu vois ce que peut voir n'importe quel-le internaute sensé-e même en ignorant les arcanes techniques du bidule.
Leur bêtise n'est pas tant de ne rien comprendre au truc (ils ne peuvent PAS ne pas savoir deux ou trois choses, même s'ils sont enfumés/achetés pas des lobbies, et restent surtout obsédés de super-contrôle)) que d'être persuadé qu'il peuvent constamment tabler sur la seule bêtise générale. Mais c'est le propre même de la connerie que d'être résolument persuadé qu'il n'existe pas d'intelligence ailleurs que soi ?
Le Swâmi a donné ici
http://petaramesh.org/post/2009/03/...
des explications limpides (même Christine et moi, on a compris, donc ça se peut) sur une suite prévisible de leur combine, on va peut-être arriver à en rigoler, finalement ...
;-)
Superbe balade matinale qui change de mes salades. Puis en suivant les sentiers qui conduisent chez les copains, on n'est pas déçu.
Merci.
Contente que la promenade t'ait plu. Pas de salades pour moi, la neige est à peine fondue. Si, pourtant, quelques mâches qui feront la joie de la famille demain.
C'est vrai que le texte de Swâmi est à pisser de rire, ça met de bonne humeur.
Moralité : On est gouverné par des cons et de toutes façons c'est impossible de gouverner. "Ils" ont même voulu réglementer l'usage des armes à feu.
J'aime tellement mieux quand tu parles de sujets que tu connais.
Tiens, les mathématiciens qui se sont intéressés à la quadrature du cercle, ils ont fait faire beaucoup d'avancées aux mathématiques. Mais est-ce intéressant de faire avancer la science, ils auraient peut-être mieux fait de cultiver leur jardin?
Bisous.
MarieO
Oui, bien sûr, quand on fait dans la métaphore, c'est toujours partiel, on peut pas penser à tout. Si ça se trouve, les mathématiciens qui ont bossé sur la quadrature du cercle cultivaient aussi leur jardin. Ou quelqu'un cultivait pour eux. Il faut de tout pour faire un monde.
En tous cas je leur fais mes excuses, loin de moi l'idée qu'il est inutile de faire avancer la science. Je ne crois pas que ce soit non plus l'idée de "La quadrature du net". Ils utilisent l'image d'une impossibilité mathématique mise en évidence par la science, mais (car?) ce sont des fervents de la science.
J'avais ri de bon cœur en lisant le billet du Swâmi (la grâce d' Om Namah soit sur lui), j'ai ri derechef en lisant celui-ci.
Avec d'autant plus de cœur que j'ai planté tantôt — et sans calculette ! — des échalotes grises dans un rond plein de coins. Ça rebique de partout, c'est très joli.
Un jardin très agréable à visiter.
Je partage tout à fait ton avis de non professionnelle de la chose quant à l'initiative du gouvernement.
Comme toi, certainement pire même, j'ai des lacunes en la matière, mais à visiter les blogs et sites expliquant la chose, on a les moyens de se faire une idée.
C'est un des énormes avantages du net, à mon avis.
Merci pour ton commentaire (que je découvre à l'instant) sur mes fleurs de printemps. A bientôt.
Comme quoi l'histoire - de quatre gus dans leur garage en l'occurence - peut éclairer le présent … ;-)
Bonjour Jardin..Je viens de découvrir ton com sur mon blog...
Mon dieu, comme il est dommage que je ne puisse effacer mes coms comme mes articles....Dois-je demander à Céleste d'effacer mon com ? Sinon, j'ai peur que ce terme "intello" me poursuive longtemps...
Oui, j'écris trop sur des coups de tête...Je ne réfléchis jamais quand j'écris....Mais, ce n'est pas à mon âge que je vais changer....
Je m'excuse encore pour ce terme..Tu sais, je suis une épidermique qui démarre au quart de tour....Je n'ai pas fait d'étude...Je me suis arrêtée en seconde...En partie de ma faute...Alors, quand je vais sur des blogs où il y a surtout des --xxxx, je me sens tellement petite que je deviens agressive...Oui, un mot chez un blogueur m'a fait bondir...Mais, je suppose que c'était involontaire chez lui et j'ai du mal interprêter ses propos......il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre...Chez moi, on pourrait dire comprendre....
Et pis, je n'ai qu'à ne pas mettre de coms...Mais, j'adore ça mettre des coms partout et dire ce que je pense..Autant qu'écrire...La preuve, ce matin, au lieu de mettre un article chez moi, je me suis baladée sur les blogs..J'en ai même oublié mon jardin..Non, le jardin, je n'y touche pas..C'est mon mari qui est un fou de jardinage...
Mais, chez toi, peut-être que le mot jardin n'est qu'une métaphore...Je vais lire un peu pour voir de quoi sont faits tes articles...Si tu racontes des salades, si tu parles de navets, si tu rougis comme une tomate aux plaisanteries douteuses des blogueurs....et j'en passe....Bof, humour à la noix ce que je dis...
Ce serait dommage d'avoir effacé, nous n'aurions pas eu l'occasion de bavarder ensemble. Je te comprends très bien, quoiqu'ayant fait des études, je me suis aperçue un jour qu'il y avait des mots que je n'utilisais jamais. Je les comprenais, bien sûr, mais quelque chose me bloquait pour me les approprier. Une question de milieu social.
Du coup, je suis partagée: les utiliser, c'est me situer sans équivoque du côté de ceux qu'on nomme "intellos". Mais ne pas les utiliser, c'est capituler, reconnaître que la langue française ne m'appartient pas entièrement.
Pour répondre à ta question, "cultive ton jardin" est à la fois une métaphore (fais ce que tu dois là où tu peux) et une réalité, j'ai bel et bien un jardin que je cultive... comme je peux, après une interruption d'un an.
Mmmh... je crois bien qu'en fait on nous prend vraiment pour des cons... Comme d'hab !
Et pour ceux qui auraient pas bien compris...
Ca marche aussi si vous avez parfaitement compris, et que vous voulez aider d'autres à comprendre... ou juste rigoler un coup, c'est bon pour la santé.
Moi, je fait partie de ceux qui n'ont pas tout compris mais au moins trouve ici une belle occasion de m'amuser de la belle écriture de Jardin
:)))
Diable, j'ai lu, j'ai compris, je pense, que certains milieux dits "dirigeants" ont du mal à admettre que le pékin moyen puisse, oh culot infernal, donner son avis et agirdirectement contre quelque chose qui ne lui plait pas.
Fi donc, le peuple a un cerveau ! Et même allez savoir, plusieurs...
Bon je ne connaissais pas cette histoire mais je vais suivre les différents liens :-)
Magistrale démonstration de l'iniquité et de la bêtise des gens qui nous gouvernent.
Il y a une petite inexactitude concernant la partie mathématique, mais ce n'est pas important.
Ce n'est pas le fait que la racine de pi contienne une infinité de décimales qui pose problème. En général, l'écriture décimale d'un nombre rationnel (une "fraction" en mathématiques niveau collège) contient une infinité de chiffres, qui se répètent périodiquement (exemple: 1/3 = 0.333333333..., 1/7 = .14285714285...), et pourtant ces nombres se construisent fort bien avec une règle et un compas. Le nombre "racine de 2" a aussi une infinité de chiffres, mais il se construit fort bien également.
Pi, c'est autre chose, il est transcendant. Non seulement son développement décimal a une infinité de chiffres, mais c'est bien pire que ça.