Pierre qui bouge

Ma terre est pleine de cailloux. C'est en partie grâce à ça qu'elle se ressuie et se réchauffe très vite. Quand même, faut pas exagérer, et je les enlève, les cailloux: trop, c'est trop. Le gros de mon jardin est déjà bien épierré. Mais quand je défriche un nouveau coin, j'ai un aperçu de ce que c'était avant. Un peu de terre entre beaucoup de cailloux. Sans compter les cailloux profonds, pas si profonds que ça.

Comme je suis une paresseuse, je me contente de faire de petits tas, ça et là, que j'enlèverai, c'est sûr, demain. Ou après demain. Ou que je laisserai s'enterrer doucement, pour les redécouvrir à la saison prochaine (mais pourquoi donc une telle densité de cailloux en bordure d'allée?), faire et défaire c'est toujours travailler. J'ai trouvé un truc pas mal, je garde les filets quand j'achète des pommes de terre. Quand un sac est plein, je le vide: j'ai un tas dans les broussailles, qui commence à évoquer ces pierriers qu'on trouve en montagne, entre deux champs autrefois cultivés. Quelquefois, j'attends trop, et le sac se bio-dégrade, ou se fait éventrer par la débroussailleuse: rebelote à ramasser les cailloux éparpillés. Ça donne du boulot, la paresse.

Justement, j'étais en train de ramasser, avec l'aide de ma petite princesse, un petit tas sous une rose trémière. Alors que "mes" cailloux sont plutôt blancs et anguleux, je découvre, sous le tas, une pierre grise, plate et toute ronde. Je la prends... elle est molle et elle bouge. Waouh! un cri de surprise m'échappe, immédiatement doublé en écho par un cri de terreur de ma petite princesse: j'ai dérangé un crapaud!

Pas du tout essayé de l'embrasser (merci à Ziggie pour l'inspiration), vu que j'ai absolument pas besoin de prince charmant, et pas envie non plus depuis que j'ai vu le gominé prétentieux de Shreck. A la limite, je pourrais me sacrifier et embrasser un prince charment pour le transformer en crapaud, vu que les crapauds, c'est très utile.

Bon, celui-là, je lui ai vite mis à disposition un tas d'herbes arrachées de frais. Et nous sommes parties sur la pointe des pieds pour le laisser se remettre de sa grosse émotion.

Tiens, ça me rappelle ma dernière conversation avec un chasseur ennemi des écolos, qui s'enrageait de voir le Conseil Général dépenser l'argent de SES impôts pour construire un crapaud-duc: "Vous voulez vraiment protéger les crapauds? Faut flinguer les hérons!"

Faire comprendre le concept de biodiversité à certains, ben c'est pas gagné.

Commentaires

1. Le mercredi 3 août 2011, 21:55 par Valérie de Haute Savoie

Ouh la surprise ! J'aurais crié aussi, c'est toujours très déroutant de croire à une chose et d'en découvrir une totalement différente.

2. Le lundi 8 août 2011, 13:15 par Ziggie

Ma terre aussi est pleine de cailloux. Il me faut creuser un m3 et charrier des brouettées de schiste pour planter le moindre arbrisseau. Petit à petit, j'entre en renoncement...

Il y a ici beaucoup moins de crapauds dits communs, aujourd'hui qu'hier.
Les nuits humides, il fallait bien regarder où on mettait les pieds pour ne pas les écraser.

Une espèce a disparu de mon jardin : le petit crapaud accoucheur au chant des merveilles...
Une seule note, pure et claire que tous les autres reprenaient, un par un, sur un ton différent.
Écho des regrets.

L'escargot de Quimper qui l'accompagnait souvent (coïncidence ?) ne figure plus non plus parmi mes amis. Et la salamandre se fait rare.

Ont-ils perdu leur sang froid devant tant d'incompréhension de la race dite humaine ?

@ toi

3. Le lundi 8 août 2011, 22:49 par cultive ton jardin

C'était une sacrée chance d'avoir des crapauds accoucheurs chez toi, et tu dois être bien triste de leur disparition. Leur chant est émouvant de fraîcheur et de nostalgie.

Je ne connaissais pas l'escargot de Quimper. Chez moi, j'ai surtout des Bourgogne et des Petits Gris, ces derniers introduits accidentellement avec un plant de rhubarbe, mais manifestement très heureux chez moi.

Et, hélas, des limaces, des milliers, des millions peut-être. Heureusement, les sécheresses successives et ma lutte opiniâtre et tous azimuts les ont bien décimées. La première année, toute plantation de salades et même de poireaux (elles n'aiment pas les poireaux normalement) était détruite en quelques heures. je ne parle pas des semis qui n'avaient pas le temps de voir le jour.

4. Le jeudi 18 août 2011, 11:42 par Ziggie

Tu vois, paradoxalement, les petits crapauds ont disparu lorsque les étés sont devenus beaucoup plus humides. C'est vrai que leur chant me manque.



L'escargot de Quimper (espèce protégées) est très discret et il est presque plat : http://bretagne-biodiversite.org/se...
Il y en avait beaucoup dans la forêt. Maintenant je ne trouve que des coquilles vides.

Pourtant, là où je vis, l'environnement est relativement protégé (parc d'Armorique) et nous sommes de plus en zone de captage d'eau depuis 2003 : plus de cultures, plus d'épandage, que des friches.

En ce qui concerne les limaces, un copain maraîcher bio me disait qu'elles étaient à la fois phytophages et carnivores et que plus ont les détruisait, plus il y en avait car elles se mangent entre elles. Je n'ai jamais vérifié mais cette année, je les ai laissées vivre leur vie et mes plantes n'ont pas été plus dévorées que les années passées. Ces visqueuses adorent les lupins naissants...

Mes lys par contre l'ont tous été mais j'ai découvert les coupables : ce sont les larves d'une bestiole rouge ravissante, le Criocère.

On ne pense pas assez souvent aux petites larves diverses, bien cachées sous les feuilles comme la chrisomèle de la menthe par exemple, qui est si jolie mais qui fait des dégâts considérables si on n'a qu'un petit pied de menthe.

J'ai beaucoup de (très gros) petits gris qui raffolent des acanthes.

Pour l'instant, j'observe les piérides détruire mes capucines... Je triche un peu, je coupe les feuilles habitées et je vais les jeter dans un champ de l'autre côté de la route.

Il semble que chaque plante ait son prédateur de prédilection et ce serait bataille sans fin que de vouloir tout éradiquer. Dans une autre vie, j'avais un potager merveilleux (qui me manque) et je dois avouer que j'étais sans pitié pour les ravageurs... (les taupes soulevaient un rayon de haricots verts en une nuit et les larves des taupins détruisaient des laitues belles à croquer en quelques heures).

La vie de jardinière n'est pas de tout repos...

5. Le samedi 20 août 2011, 17:22 par Jacques

Eh oui, moi aussi j'ai beaucoup de cailloux....
Mais comme ma terre (glaise) n'est pas très fertile, ils ne m'ennuie pas trop.

Mais personne ne parle ici des hérissons.

Alors, je me permets ce renvoi:

http://lamauragne.blog.lemonde.fr/?...

Bien cordialement,

jf.

6. Le lundi 22 août 2011, 20:48 par zeb'

J'avoue, j'ai ri... Ce qui est très vilain parce que dans la même situation j'aurais braillé au point de réveiller tout le village!!

7. Le jeudi 25 août 2011, 12:40 par Ziggie

Pardon de n'avoir pas répondu plus tôt mais habituellement, j'ai une notification dans ma boîte mail...

J'avais eu le sentiment qu'il s'agissait ici d'un espace féminin (j'ai lu tous les posts de la rubrique "Femmes".
A moins que ça ne soit un espace à deux voix...

Au sujet des hérissons, alors que je vois des crottes partout à cause probablement des petits gris qui pullulent, je n'en ai jamais vu un seul chez moi. Peut-être que la nature sauvage et foisonnante leur permet des hébergements discrets.

Il est vrai que sur les quatre voies qui mènent à Brest ou Quimper, les écrasés sont légion, accompagnés très souvent de renards et même parfois de blaireaux. Ça me rend malade.

En pleine ville et à Chartres dans le jardin (entièrement clos) de mon père où les lilas n'étaient plus fleuris, il y en avait un chaque soir en juillet 2010. Un peu sauvage au début, mais à force de patience j'ai réussi à l'approcher.

Comme il faisait très sec, je lui mettais de l'eau et des croquettes pour chat (parce qu'il y avait aussi un chat errant dans la rue).

Chaque soir il attendait devant sa vaisselle personnelle.

Papa est mort en avril et son jardin de juillet me manque.
Son jardin aux quatre saisons va me manquer. L'hiver, un écureuil flamboyant me tenait compagnie sur une branche de noyer perché, vif comme une flamme dansante.

La vie passe...

Merci Jacques.

8. Le jeudi 25 août 2011, 15:02 par cultive ton jardin

Normalement, un hérisson a besoin d'un très grand territoire, de l'ordre de l'hectare. Dans un jardin clos il lui faut un petit espace pour sortir. Quand j'avais des chats, un hérisson venait régulièrement voler leurs croquettes, avec un vacarme inouï, et disparaissait très rapidement si on faisait le moindre bruit. Je ne le vois plus, mais je serais étonnée qu'il ne soit plus là, l'environnement s'y prête bien, et je veille à laisser toujours un ou plusieurs coins sauvages (tas de bois, broussailles, pour leur permettre d'hiverner et de se protéger.

Mon blog est principalement un blog de nature et de jardinage, mais bien sûr, vu que je suis une femme, ce qui concerne les femmes me fait réagir. Et vu que je suis un être humain, tout le reste aussi.

9. Le lundi 29 août 2011, 23:21 par Ziggie

Pardon d'avoir cru que tu avais écrit le dernier commentaire, j'ai rougi jusqu'aux oreilles de ma maladresse.

Il est bien calme ton jardin en ce moment.
Et tout le reste aussi.
Ici.

Ailleurs...