Parler de Gaza?

"Normalement quand il y a la guerre dans un pays, les gens fuient. A Gaza, personne ne fuit. Gaza est quand même la zone avec la plus forte densité de population au monde et ils ne peuvent aller nulle part."

Cette phrase retrouvée au milieu de tant d'autres sur le site de Médecins Sans Frontières, pourquoi me touche-t-elle plus que d'autres, tellement plus tragiques? Je suis née fin 1944 à Grenoble. La guerre n'était pas finie, mais la ville était libérée depuis peu. Les bombardements, je ne les ai connus que dans le ventre de ma mère. Pourtant, toute mon enfance, j'ai eu la hantise des avions, surtout la nuit, des sirènes, même anodines. Cette phobie touchait même certains bruits de moteurs. Plus tard, quand il a été dit que non seulement le bébé est une personne, mais que le foetus a des oreilles et communique émotionnellement avec celle qui le porte, j'ai compris que ma panique était celle de ma mère courant vers l'abri anti-aérien du quartier.

Pas d'abri anti-aérien pour les enfants de Gaza. Pas de panique? Certains dansent dans la rue, comme Gavroche sur sa barricade. "C'est la faute à....". Des enfants tellement terrorisés (même pas peur!) que la mort les fait rire. Des hommes de Gaza courent avec un enfant blessé dans les bras. Des femmes de Gaza se demandent pourquoi elles ont fait des enfants puisqu'elles ne peuvent pas les protéger. Nulle part où fuir.

De moins en moins d'eau, d'électricité, de nourriture, de médicaments, de médecins. Et ça continue, encore et encore. Une trève, quelques heures. Et ça recommence. Encore moins de tout.

Gaza est un ghetto, Gaza attend sa solution finale.

Et nous, on attend quoi?

Depuis longtemps, je voulais parler de Gaza. Les mots, j'arrivais pas à les trouver. Juste des images, des souvenirs. Un monument aux morts, en Kabylie, quatre-vingt noms au milieu de rien. Mais où avait-on trouvé tant de gens à tuer? Des images de ruines. Avec des gens qui errent au milieu. Les ruines de Dresde. Des images de ghetto. Celui de Varsovie. Des colonnes de réfugiés, sur les routes, celles du film "Jeux interdits". Des tableaux aussi, Guernica, les Massacres de Chio, le Radeau de la Méduse. D'autres tableaux, ceux de Jérôme Bosch.

Puis une question: combien faut-il de morts pour qu'un peuple se rende? Pour qu'il capitule, se soumette? Et si le désespoir le plus noir, quand on a plus rien à perdre pas même ses enfants, ne conduisait pas à la soumission mais à l'intransigeance la plus extrême? Gaza ne peut plus rien pour Gaza.

Ceux qui sont dehors, seulement, peuvent quelque chose.

Commentaires

1. Le lundi 12 janvier 2009, 18:15 par vieil anar

Bonjour mc, comme toi, je sens cette impuissance face à ce conflit absurde, comme tant d'autres, plus que d'autres sans doutes.
On ne peut prendre parti, enfin, moi, en tous cas, ni pour les uns, ni pour les autres. Et cette horreur se perpétue, avec des générations qui n'auront connu que la guerre, comme dans "ton" Vietnam !!
Un jeune de 20 ans, il y a quelques jours m'a demandé de lui expliquer le conflit; "J'y comprends rien", disait-il, et pourtant il est loin d'être idiot; au bout d'une heure, il commençait tout juste à comprendre et moi je me demandais si mon explication était la bonne!

Juste une image d'info, qui m'a frappé, il y a 1 jour ou 2; c'était une mère palestinienne avec un enfant blessé dans les bras: " Pourquoi, pleurait-elle, pourquoi..., avec les enfants, ils n'ont pas le droit, qu'ils se battent entre ...combattants!!"; réalisait-elle seulement que cet enfant , qu'elle portait, serait, lui-aussi, un jour, un combattant..!?

2. Le lundi 12 janvier 2009, 22:45 par Emelire

que dire sinon que nous fabriquons des armes pour qu'elles servent, que si elles sont utilisées alors nous pouvons en vendre d'autres et continuer à en fabriquer. Pour moi c'est une question d'argent et de pouvoir. On enrobe tout cela d'idéologie, de religion, de territoires, mais il y a sur terre de la place et de la nourriture pour tout le monde, c'est uniquement pour que certains puissent être ultra puissants, ultra riches, que d'autres, qui sont nés là par le hasard de la vie, ... sont affamés, et tués. Nous montrer ces images d'horreur, c'est une manière terrible de perpétuer ça, de faire que ça puisse continuer. On dit un morceau de l'histoire : oui c'est horrible. On ne vient jamais sur les racines de tout ça. Enfin ceux qui le font ne risquent pas de se voir confiés un quelconque pouvoir ... malheureusement.

3. Le mardi 13 janvier 2009, 02:14 par cultive ton jardin

Vieil Anar, moi je prends parti. Ne pas prendre parti, dans ce contexte, c'est choisir le camp du plus fort. La disproportion du chiffre des morts nous dit à quel type de "guerre" nous avons affaire, une guerre d'extermination. Le contraste des quotidiens, Gaza assiégée, affamée (depuis quand?), manquant de tout, d'eau, de soins, nous dit qu'il s'agit d'anéantir non une armée mais une population.

Et cela nous prépare, peut-être, des lendemains terribles. Si tu as suivi mon lien vers le blog de Paul Moreira, tu peux en effet te demander ce que deviendront ces enfants, des combattants haineux plus féroces que ceux qui les terrifient aujourd'hui, ou des combattants de la paix tellement gavés d'horreur qu'ils feront tout pour que ça ne revienne pas?

4. Le mardi 13 janvier 2009, 13:56 par vieil anar

@ jardin-mc, je constate qu'on prend parti de toutes parts, toi, y compris, et je peux le comprendre, je ne juge personne..surtout pas!
Ce ne sont pas les chiffres des morts de part et d'autre, près de 900 d'un côté, 8 de l'autre, qui font une réalité, et je ne choisis pas le camp du plus fort, en ne prenant pas parti...!
J'ai suivi, justement, ton lien, vers le blog de Moreira, à travers lequel on sent bien qu'ils préfèreront mourir tous, jusqu'au dernier, bien plus même que Gavroche, sur les barricades de la Commune....

Cette logique là, est implacable, qui fait des enfants des martyrs, déjà, avec même un mépris de la mort incroyable, tant la mort même est leur compagne de chaque heure...!

Mais autant la mort possible, même probablement plus lointaine, est la compagne des Israeliens proches de Gaza, à portée de leurs missiles plus ou moins en carton-pâte, mais qui peuvent tuer parfois...!
C'est la menace permanente qui est insupportable...! Insupportable, au point que même les plus modérés voient comme inéluctable, l'action militaire en cours, mêm si ils n'en voient pas bien l'issue...

Alors, bien sur que j'aimerais être de coeur, avec les assiégés de Fort Alamo, pris dans le même piège à rats que ceux des Ghettos de Varsovie, de Cracovie ou d'ailleurs, mais je connais quelques juifs d'Israël, de Jaffa,(les oranges, pour rappeler le boycott de l'Afrique du Sud, évoqué par Naomi Klein...!), tiraillés entre la peur des alertes quotidiennes, oui ça va jusque là et leur engagement à gauche....!

5. Le mardi 13 janvier 2009, 15:54 par cultive ton jardin

Personnellement, je fais parfaitement bien la différence entre un gouvernement qui emmène tout droit son peuple à la catastrophe, et les citoyens ordinaires, y compris ceux qui font confiance à ce gouvernement criminel.

Il me semble que nous sommes bien placés, ici, pour savoir que gouvernement et peuple sont deux entités très différentes. Et qu'il n'est pas facile de résister à une propagande bien menée.

Même s'ils sont très peu nombreux, je ne compte pas pour rien les morts israëliens, loin de là.

6. Le mardi 13 janvier 2009, 19:29 par vieil anar

Que le peuple et ceux qui le gouvernent soient parfois si différents, qu'on se demande même s'ils font partie du même pays, c'est malheureusement la loi de nos démocraties biaisées par le suffrage universel, par contre la mauvaise foi de nos "élites" est toujours la même.
La dernière intervention de BHL à ce sujet, dans "Le Point", est remarquable de cynisme...! Pouah...!,(je cherche le lien!).

7. Le jeudi 15 janvier 2009, 06:57 par Francoise-Louise

Bonjour,
Votre commentaire au mien, sur le blog de Celeste m'a interpellée et je suis venue voir de plus près qui me répondait de façon si pertinente et solidaire et respectueuse pour les humains engagés dans ce conflit de quelque bord qu'ils soient.
Dans la mémoire des gouvernants Israéliens, en-deça des camps, la guerre dite "des 7 jours" où les peuples arabes réunis avaient décidé de "libérer" un territoire palestinien confisqué, au profit d'une minorité de confession juive, et que les Israéliens avaient vécu comme une tentative de solution finale n°2.
Alors aujourd'hui, c'est eux les maitres du guetto...
C'est une position gouvernementale. Ce n'est pas la volonté de tous les juifs, loin s'en faut, car nombreux sont ceux qui ne voient que le désastre renouvellé avec d'autres humains pris en camp de concentration pour seul motif d'identité.
Comme le psy est un médiateur nécessaire quand l'individu n'arrive pas à gérer son traumatisme, et se comporte avec violence, sans médiateur ce conflit peut se perpétuer à l'infini.
La médiation me semble la solution d'urgence du moment et, comme en cas de crise pour l'individu, elle doit être imposée aux peuples malades des souffrances antérieures et qui aboutissent à des crimes contre des humains impuissants, contre l'humanité.
Merci
Françoise

8. Le vendredi 16 janvier 2009, 11:47 par Mimi Vaurien

Gueuler, gueuler, gueuler. Et ne surtout pas se taire. Et ne jamais se rendre !

9. Le dimanche 18 janvier 2009, 12:42 par Eliane

Le silence étasunien est .... tonitruant et condamne ce conflit à se répéter, israel étant couvert et absous par un état déja voyou dans bien d'autres conflits mondiaux. J'epère un sursaut du peuple américain car les démocrates n'ont jamais fait mieux que les républicains en matière de gendarme du monde. Entendre le témoignage de juifs ou musulmants modérés est important . Etre solidaire du peuple ans cautionner les extremismes qu'il soit musulmans intégriste ou juif armé jusqu'au dent par leurs amis . La population civile est utilisée par les 2 belligérants . Ceci est la poursuite d'une logique de guerre dans cette zone du globe. au profit d'un tiers .Désespérant!

10. Le dimanche 18 janvier 2009, 15:00 par cultive ton jardin

Peut-être un jour les peuples du monde, unis contre le malheur, seront-ils en mesure d'imposer la paix à tous ces dirigeants corrompus, dominateurs et criminels.

Que chacun de nous, hommes et femmes de bonne volonté, apporte sa contribution à ce dénouement...

11. Le vendredi 6 février 2009, 19:35 par alain

Quand les hommes vivront d'amour
Ce sera la paix sur la Terre
Les soldats seront troubadours
Mais nous, nous serons morts mon frère.............